Le siècle des Lumières a donné une rationalité et un pragmatisme à nos savoirs modernes. L’empreinte de ces savoirs et leur utilité civilisatrice se sont modelées en fonction de l’histoire des pays et de leurs cultures. Sur le plan international, le projet majeur des Lumières repose sur l’idée d’une gouvernabilité du monde qui dessina les contours actuels de notre mondialité. Dans ce sens, les savoirs anthropologiques des Lumières ont consacré une universalisation, mais aussi une uniformisation standardisée des systèmes de représentation des rapports Europe-Afrique. Nous voulons donc, à partir des textes fondateurs de l’anthropologie des Lumières, étudier et comparer les réponses données en France et en Allemagne aux interrogations suivantes, qui ne sont pas abordées dans le sens que nous leur donnons par la recherche actuelle : (1) Que savaient les philosophes, anthropologues du siècle des Lumières sur l’Afrique ? Quelle utilisation (téléologique, gnoséologique) fit-on de ces savoirs ? (2) Comment ces savoirs se sont-ils transmis dans le temps et l’espace européen, précisément en Allemagne et en France ? (3) Quelle est, dans le processus de gouvernabilité du monde, la place que les Lumières attribuèrent à l’Afrique noire ? (4) Comment est-on passé de différents types d’explications des civilisations humaines à une explication raciale des différences entre les civilisations ? (5) Comment cet argumentaire a pu se prévaloir d’une rationalité admise par les esprits les plus éclairés d’Europe et de quels types de rationalité s’agit-il ? (6) Quelles sont les influences actuelles des pratiques discursives des Lumières sur le façonnement des relations Europe-Afrique ?