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Des années 1930 aux années 1970, les SHS françaises ont été fortement internationalisées. Les paradigmes constitués par l’École des Annales en histoire, le structuralisme en anthropologie ou en linguistique et la déconstruction en philosophie représentaient les cadres théoriques et méthodologiques dominants dans la recherche internationale. L’attractivité de la recherche française et des institutions qui la portaient et accompagnaient son rayonnement à l’étranger était considérable.
Depuis trente ans, la multiplication des sources et des lieux de savoir au niveau mondial, l’extraordinaire développement des moyens de diffusion des connaissances, le dépassement du « nationalisme méthodologique » pour penser les questions contemporaines de manière globale, la vive concurrence entre grandes institutions universitaires mondiales, le rôle moteur des carrières individuelles dans la professionnalisation de la recherche ou l’évaluation externe de la production scientifique et de son financement ont profondément modifié la manière dont procède l’internationalisation de la recherche. À la fois moyen permettant d’atteindre une certaine forme d’excellence scientifique et vecteur de rayonnement de celle-ci dans le champ des connaissances, l’internationalisation ne se constate plus, ni ne se décrète ; elle se construit.
Dans le domaine des SHS, la recherche française dispose d’un dispositif de qualité, riche et diversifié dans nombre de domaines essentiels. Le potentiel de recherche français ne tire toutefois pas parti, sauf en de trop rares exceptions, des opportunités intellectuelles, des ressources scientifiques et financières, des partenariats institutionnels qu’offrent un processus maîtrisé d’internationalisation.
De nombreux efforts ont été déployés au cours des dernières années pour redresser l’attractivité des SHS françaises et des institutions qui les font vivre, tant au niveau individuel des établissements et des organismes qu’au plan collectif dans le cadre des regroupements sur site ou des réseaux thématisés. Les créations récentes en France d’IEA, des écoles d’économie de Toulouse et de Paris, du Collège d’études mondiales de Paris, pour ne citer que quelques exemples, représentent des initiatives scientifiques, méthodologiques et intellectuelles innovantes, propres à renouveler les termes du débat en France, à l’ouvrir aux questionnements et approches qui se sont développées depuis le tournant de la globalisation des trente dernières années, et à ancrer ce renouvellement dans le tissu universitaire.
Ces efforts et initiatives, auxquelles participe le dispositif centré sur la mobilité « sortante » (IFRE, EFE, UM internationales, laboratoires internationaux associés, etc.), doivent se connecter, se renforcer mutuellement, tirer le meilleur parti des synergies potentielles dans une dynamique renforcée avec des partenaires européens et internationaux, pour collectivement être à l’échelle des enjeux relatifs à la mobilisation du potentiel national de recherche. Cette recommandation figure dans le rapport « Internationalisation » de l’Alliance Athéna, qui indique plusieurs pistes d’actions de nature à renforcer la position de nos chercheurs, de nos établissements et de nos réseaux en SHS au sein de l’Espace européen de la Recherche et plus largement dans la recherche mondialisée :
- rendre possible l’enseignement de quelques matières fondamentales dans la langue la plus utilisée par la communauté scientifique internationale de la discipline considérée,
- renforcer la mobilité internationale, dès le début des parcours de recherche, pour s’informer des grandes évolutions des courants de pensée et participer à des réseaux internationaux,
- mieux accompagner la préparation des projets européens et internationaux,
- valoriser les expériences internationales dans les recrutements des chercheurs et des enseignants-chercheurs,
- faciliter le portage par des fondations intégrées aux communautés universitaires et d’établissements, à des instituts ou des organismes scientifiques.
Parallèlement à la mise en œuvre progressive de ces actions, un cadre national pour l’internationalisation des SHS a été formé avec la création en 2012 de l’infrastructure NEFIAS (Network for Internationalising Advanced Science) par le ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche. Placée sous la responsabilité de l’Alliance Athéna, l’infrastructure NEFIAS – dont la préfiguration a été confiée à la direction du RFIEA – a pour but d’offrir des services pour faciliter l’internationalisation de l’ensemble de la communauté scientifique française en SHS :
- une action de veille, de collecte d’information et de constitution de base de données afin de renforcer la lisibilité des actions, des dispositifs et des structures ;
- une action d’information, de diffusion et de relais pour renforcer la fluidité de l’information au bénéfice des communautés de chercheurs ;
- une action de développement, d’expertise et d’impulsion pour accélérer la mise en œuvre d’initiatives permettant de tirer parti de mutualisations et de synergies encore insuffisamment exploitées.
L’approche retenue pour le développement de l’infrastructure est celle d’une plateforme afin de créer les conditions d’un échange structuré et équilibré avec les principaux acteurs français et de dialoguer avec les grandes institutions et les grands réseaux internationaux pour identifier les meilleurs partenaires en fonction des priorités et des initiatives retenues. Deux chantiers prioritaires ont été fixés : l’amélioration de la réponse française aux appels européens et l’optimisation et le renforcement des dispositifs de mobilité entrante et sortante.
Sont notamment programmées la réalisation d’un portail Incoming mobility (destiné à promouvoir les dispositifs d’accueil de haut niveau en France à l’attention de la communauté internationale) et Outgoing mobility (destiné à la communauté française pour faire connaître les dispositifs de mobilité à l’étranger) ainsi que des actions de développement (synergie avec les appels d’offres internationaux de l’ANR, développement d’un projet européen pour cofinancer la mobilité « sortante », etc.).
Par le biais du réseau qui les regroupe, les IEA français participent pleinement, avec leurs caractéristiques spécifiques, à cette dynamique d’internationalisation, ce qui contribue à renforcer leur inscription scientifique et institutionnelle tant au niveau des politiques de site que sur le plan national.