Transformation sociétale et changement climatique

auteur

Juergen Weichselgartner

date de sortie

01/06/2016

discipline

Sciences de la terre, de l’environnement et du climat

Au cours des dernières années, les chercheurs et les responsables politiques ont acquis une conscience accrue des limites des actions pour le climat. On constate d’une part que les sciences du climat sont fragmentées et s’orientent rarement vers les besoins politiques et pratiques, et que d’autre part l’élaboration de politiques climatiques se concentre principalement sur les impacts à court terme. La forme classique du transfert de connaissance de la science vers la politique et l’action ne semble pas fournir de résultats satisfaisants (Weichselgartner 2013). En outre, la transition vers une société climato-résiliente nécessitera un changement social et comportemental. Or, peu de travaux à ce jour ont exploré les moyens d’y parvenir.

 

En Europe, l’intégration dans les politiques climatiques et les programmes d’actions qui répondent à ces questions suit la ligne définie par la stratégie d’adaptation lancée récemment par la Commission Européenne (EC 2013). La recherche actuelle vise à générer des connaissances sur le climat et à évaluer les coûts et les bénéfices des mesures à prendre (EEA 2014). Cependant, la notion d’ « intégration » doit être soumise à un examen critique. Jusqu’à présent, la réponse des pays européens au changement climatique s’est concentrée sur l’élaboration de stratégies nationales (EEA 2013), avec des activités allant de l’évaluation du risque aux plans d’action à court terme. S’assurer d’approches cohérentes, flexibles et participatives capables d’intégrer différentes actions afin de construire une politique climatique durable et pérenne (EEA 2014) reste un défi à relever.

 

Une prise de conscience croissante des limites de la science du climat telle qu’actuellement pratiquée et de l’action climatique telle qu’actuellement élaborée a orienté l’analyse sur les voies par lesquelles les décisions et les actions entreprises prennent forme. Alors que la plupart des études sur la gouvernance climatique examinent les processus de développement de régimes internationaux et la relation entre les États-nations et les institutions internationales, il est de plus en plus communément accepté que seule une approche multidimensionnelle prenant en considération les processus politiques, les structures institutionnelles et le contenu politique peut saisir la complexité du phénomène de gouvernance. Il s’avère en outre que d’autres acteurs et d’autres échelles sont également significatifs (IPCC 2014). Le rôle joué par les villes, les entités publiques et privées, et les réseaux transnationaux, mais aussi les interactions entre les réseaux et les échelles sont des éléments importants et néanmoins inexplorés. Tout ceci requiert une perspective de recherche transdisciplinaire et un focus portant non plus sur le gouvernement mais sur la gouvernance.

 

Répondre efficacement au changement climatique n’est pas uniquement une question d’ajustements législatifs ou infrastructurels mais un processus complexe de transformations sociétales qui doit être étudié en tant que tel. Les mécanismes qui pourraient permettre une transformation vers des sociétés plus résilientes demeurent à ce jour sous-explorés (Weichselgartner & Kelman 2015). Bien que les innovations techniques s’avèrent essentielles à cette transformation, elles ne suffiront pas. La transformation s’inscrira plutôt dans des processus plus vastes de changement sociétal et il nous faut donc acquérir une meilleure compréhension de la manière dont ces changements se produisent. Ce qui dicte la production de connaissances utilisables et la manière dont cela recoupe les cadres de gouvernance afin de répondre aux complexes changements homme-environnement restent aujourd’hui inconnu. La demande croissante des décideurs et des agences de financement de la recherche pour une recherche climatique qui soit politiquement pertinente souligne le besoin urgent d’une perspective de recherche intégrative sur la politique sociale et la gouvernance climatique, ainsi que d’un passage des stratégies réactives « top-down » (ou descendantes) vers des stratégies proactives conçues de manière collaborative.

 

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Juergen Weichselgartner est professeur associé de géographie à l’université Ludwig Maximilian de Munich (Allemagne). Il est spécialiste de l’analyse des interactions homme-environnement et des réponses sociétales aux risques et aux crises. Ses travaux, conduits notamment à l’International Institute for Applied System Analysis, l’université de Tokyo et l’université d’Harvard, se sont concentrés sur la vulnérabilité et la résilience sociales vis-à-vis des processus de changements planétaires. Ses activités professionnelles incluent des évaluations pour le GIEC - Groupe d’Experts Intergouvernemental sur l’Evolution du Climat et des contributions pour le PNUD – Programme des Nations Unies pour le Développement).

fellows

Géographie
Sciences de la terre, de l’environnement et du climat
14/09/2015 - 13/07/2016

institut

01/09/2006
01/12/2006