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La « langue maternelle » allemande
Dans la conjoncture nationaliste de l’Europe centrale au xixe siècle1, l’épuration devint – la langue dite maternelle fut déjà chez Herder érigée en critère de nationalité – une opération politique déguisée en une forme culturelle et « scientifique ». Le xixe siècle est le siècle des vocabulaires et des orthographes qui introduisent – en distinguant et divisant les masses parlantes jusque-là non différenciées en des langues naturelles, nationales ou maternelles – des clôtures difficiles à franchir ; manière efficace de dissimuler la nature arbitraire de la construction des nations2.
Au cours des affrontements pour l’hégémonie politique dans l’espace germanique, une délimitation divisait de plus en plus le monde germanophone en une partie qui acceptait le haut-allemand (Hochdeutsch) – devenu au temps des confédérations germaniques une langue codifiée écrite, bureaucratique et littéraire – et, vers la fin du siècle, dans le Reich de Bismarck et à la suite du Deutschen Wörterbuch des frères Grimm, une langue allemande standardisée générale et authentique, bien qu’issue d’un compromis interlingual pangermanique. Les règles de cette langue « naturelle », connues et utilisées déjà dans les couches de la Bildungsbürgertum dans l’espace germanique, furent publiées pour la première fois dans l’édition de l’Ortographische Wörterbuch der deutsche Sprache, 1880, par Konrad Duden en vue de l’homogénéisation de l’espace linguistique allemand, tandis qu’un groupe, appartenant aussi au Hochdeutsch mais non intégré, se crispait aux idiomes locaux dégradés désormais, bien qu’ayant une tradition littéraire plus vieille, aux variantes, dialectes ou patois (à côté de langues parlées dans la région septentrionale de l’Allemagne et appartenant au groupe du niederdeutsch ou plattdeutsch). En 1901, ces règles deviennent officiellement celles de la langue allemande tout court. Ainsi le Plattdeutsch n’a pas seulement perdu, au nom de l’unité allemande, le statut de langue littéraire, il était également remisé au second plan. Au cours des xixe et xxe siècles, l’idéologie de la langue naturelle (et maternelle) – produite par des linguistes-politiciens – refoulait les alternatives et la conscience de la masse non ordonnée de l’expression allemande. Les efforts allemands se répercutaient dans toutes les « nations » de la zone d’influence germanique.
L’orthographe s’est avéré être à lui seul, et sans tenir compte de son bien-fondé épistémologique, un acte de pouvoir plus ou moins adossé aux travaux linguistiques proprement dits. Dans des situations où un groupe linguistique ne dispose pas d’un pouvoir politique et administratif institutionnalisé, il est le seul pouvoir et critère d’appartenance à l’élite ethnique3.
Insister sur une approche non–nationale (ou ultra–nationale) en examinant le national (et le « national-provincial ») est indispensable parce que cela permet de repenser le problème des critères culturels nationaux (dans les collectivités ethniques restreintes et repliées sur elles-mêmes presque inévitablement altérés, parfois inversés par rapport aux ceux des autres milieux) comprenant celui des perspectives historiques.
La langue et les contingences des événements et des personnages mis de côté, y-a-t-il donc, dans les cultures ethniques ou nationales, des différences culturelles issues des structures profondes différentes ? De telles différences, si elles existent, restent inaccessibles sans un procédé analytique qui, tout en partant des corpus « nationalement » délimités, engage les conceptions universalistes parce que disciplinaires. La nature et la pertinence d’une telle délimitation se transmue de postulat en objet de recherche4.
Pourtant, la réponse n’est ni simple, ni définitive. Depuis l’Histoire de la vie privée des Français de P. J. B. Legrand d’Aussy (1782) où on rencontre un modèle de l’histoire « anthropologique » et un plaidoyer pour elle, et depuis l’Essai de l’histoire de la Carniole et des autres pays des Slaves du Sud en Autriche quasi contemporain par A. T. Linhart5 (publié en 1788 et 1791), et surtout, après l’élaboration de l’histoire universelle par A. L. Schlözer et de l’idée de l’histoire de l’humanité par J. G. Herder6, les élaborations interprétatives à partir des corps d’archives et d’autres traces ou vestiges des époques révolues représentaient un exploit d’ordre épistémologique, bien que l’enjeu ait souvent été politique. Cette bifurcation de l’entreprise historiographique était sujette à un aveuglement au cours de ces deux derniers siècles marqués d’un côté par les idéologies sociales doctrinales, et encore plus par les idéologies scientistes et progressistes en apparence spontanées, savantes et populaires, et, de l’autre, par un éventail des inter-réactions7.
On aborde une investigation des discours sociaux de différents types (ainsi dans les sources que dans d’autres formes de présence) qui devrait mener vers l’éclaircissement des configurations conceptuelles de la réception et interprétation « nationales » – et, notamment, « nationales provinciales »8 – des phénomènes de culture et d’imaginaire des siècles révolus (surtout en Europe Centrale). Un tel objectif demande à lui seul une détermination du corps des faits assemblés, et une compétence méthodologique à part pour obtenir des renseignements sur la constitution et le fonctionnement des systèmes sociaux qui donnent forme et nature à une conjoncture historique. On procède par une différenciation des blocs thématiques qui ressemble à une progression du plus petit vers le plus grand mais qui n’a rien à voir avec un telle gradation : l’étude des phénomènes provinciaux moyennant ses documents spécifiques n’exclut pas la simultanéité du traitement des sujets d’un espace socioculturel différent (on ne conçoit pas le provincial comme plus petit, son universalité pour ainsi dire physique est plutôt refoulée qu’absente) ; bien qu’il existe une partie de différentiation substantielle, structurale, notre démarche parfois graduelle n’est que provisoire, propédeutique et tactique. Enfin, les objets culturels ne sont pas séparables de leurs contextes visibles et avoués et de ceux déniés ou cachés. Après avoir établi les mécanismes de fonctionnement du provincial, on est engagé dans la poursuite des circulations moins restreintes des objets culturels dans l’espace central-européen (non-isolable des autres espaces et sur le plan de la géographie culturelle, et sur celui de l’imbrication des structures culturelles isotopiques). On poursuit donc un double but : primo, contribution à la construction d’une approche à la matière historique qui pourrait tenir compte des facettes diverses de la vie sociale et de rendre possible la démonstration de la logique de leur entrelacement, l’accent particulier mis sur la compréhension de la conception et de l’entrelacement des plans « micro » et « macro », et, secundo, concourir au développement d’une intelligence historique englobant les connaissances différentes et les exigences respectives.
Nous nous appuyons donc sur le corpus énorme des travaux historiques et sociohistoriques accomplis (comme un point de départ, voir les bibliographies dans Kramberger, 2007 et Rotar, 2007). Pour maîtriser la matière et parvenir à un but raisonnable de notre exploit, nous limitons le champ de nos efforts à un horizon isolé, mais des plus délicats, qu’on pourrait appeler, à la suite d’Émile Durkheim (1898, 1912 et 2003), Serge Moscovici (1961), D. Jodelet (1991 et 1987), Pierre Bourdieu (1982, 1987, 2001), Marc Augé (1979), celui des représentations sociales, tandis que M. Angenot (1988 A, 1988 B, 1989 A, 1989 B et autres textes) met en œuvre les catégories de sa socio-critique et de la théorie du discours social (TDS).
Cet horizon appartient à la culture ou, plus précisément, à l’imaginaire, c’est-à-dire aux suites diachroniques et synchroniques des discours, aux réseaux de symbolisations à l’intérieur des conjonctures socio-culturelles. Aussi les mémoires collectives et les représentations sociales ne se manifestent que dans l’état de l’hétérogénéité et sous la forme de leurs fonctions idéologiques : normativité morale, rôle d’instruments techniques de la manipulation communicative, ceux de la promotion sociale, etc. La concentration « culturaliste » sur les agrégations « concrètes » met inévitablement l’accent sur le local ; en vue d’une approche plus directe à la réalité empirique des situations historiques, à leur spécificité, etc., en vue aussi d’affiner les connaissances du fonctionnement des sociétés et des cultures. Or une telle démarche comporte le danger de fragmenter des savoirs, des méthodes de recherche et, en conséquence, de leur relativisation spontanée (cf. U. Daniel, 2001).
On aurait tort de mépriser l’histoire locale parce qu’elle est locale, et, notamment, on aurait tort de mépriser l’histoire locale des représentations sociales et de l’imaginaire local sur la base d’un préjugé attribuant les exclusivismes et particularismes locaux ou le caractère de l’impasse épistémologique à un travail focalisé sur un secteur des phénomènes choisis à partir d’un critère structurel et non pas à partir de celui d’une histoire prétendument universelle qualifiée uniquement par la grandeur physique de son objet de narration et renonçant à la connaissance de la réalité socioculturelle9.
Quoique ce préjugé puisse comporter plusieurs granis salis concernant le patriotisme local de la Heimatkunde (qui n’est pas même une histoire locale), l’omniprésence des phénomènes provinciaux, leur capacité d’occuper l’espace de la société globale mettant en lumière les bévues de la grande histoire linéaire-vectorielle, démontrent l’illusoire d’une telle discrimination : les phénomènes provinciaux, images caricaturales dans leur imitation des grandes conjonctures historiques, pourraient devenir les outils de la connaissance de ces dernières. Stricto sensu, il n’existe que des histoires locales bien qu’elles soient attribuables (en principe chacune) à des localités différemment appréciées dans les conjonctures historiques (idéologiques, culturelles, économiques, etc.) variées. Pour « faire de l’histoire » d’une façon pertinente on ne peut pas se passer « des croisements entre des terrains, des objets, des échelles », car « le seul fait d’identifier un objet comme relevant de l’histoire croisée est déjà une intervention forte », et impérative, de la part du chercheur10. Il n’y a pas de local qui ne serait pas le produit des croisements des processus historiques outre-locaux.
L’histoire provinciale et l’histoire du provincial, toutes articulées comme elles le sont dans des enchaînements sociaux qui la surpassent d’un certain point de vue (qu’elle surpasse à son tour d’un autre) implique une constitution de l’objet de connaissance à la fois empirique et théorique11. Le provincial, par le fait même d’être construit comme objet, comporte nécessairement au moins une optique structurée minimale qui le constitue et qui, en tant qu’obstacle épistémologique, s’oppose à tout changement de perspective12. Cette observation est riche de conséquences, mais on n’en retient que deux. Primo : le chercheur est en effet amené à se concevoir lui-même comme impliqué dans sa manière de saisir son objet, et, secundo, la nature composite de la manière dont son point de vue intègre d’autres perspectives en les faisant plus ou moins traduisibles réciproquement ne doit pas être négligée13.
Pour nous l’histoire provinciale des Länder de l’Autriche intérieure, bien qu’ils coïncident aujourd’hui partiellement avec les territoires nationaux, n’a de sens que comme étude des phénomènes du passé (et de leurs représentations en diachronie) qui pourraient, à côté des connaissances positivistes acquises, apporter des éclaircissements manquant à l’histoire de l’Europe centrale. On n’a donc aucune intention de traiter les « mésaventures historiques » des Slovènes (sauf en objets d’analyse) imputés aux « ennemis » (héréditaires ou jurés) de la race slovène ou slave, on l’a fait déjà en abondance14 (cette attitude n’est pas le monopole des Slovènes, on la rencontre, mutatis mutandis, dans les histoires nationales appartenant au même modèle narratif partout dans le monde européen).
Dans le cas slovène, le cadre conceptuel initial fut donné par Herder par sa caractérisation favorable des Slaves. Encore en 1985, vers la fin de l’« époque socialiste », les historiens universitaires, liés au pouvoir de l’époque et disposant de la position des énonciateurs privilégiés, ont recyclé l’idéologie de la spécificité nationale (Sonderweg) et en ont fait la base des soi-disant sciences nationales sous la double domination de la « slovénistique » et « l’histoire nationale ». Ce qui se répercutait, sur le plan de la distribution des moyens financiers, comme privilèges issus de l’adhérence à l’idéologie du type le sang et le sol en postulant le droit exclusif des Slovènes – ou bien des Magyars, Polonais, etc., seuls génétiquement et spirituellement conditionnés – au traitement des « sujets nationaux ». La Sonderweg est enfin une des pièces cruciales de l’histoire nationale en Europe, et, spécialement, en Europe centrale15.
Le jeu d’illusions (supportant l’ordre étatique, aussi celles des corps ethniques construits à partir des parlers diffus) et de leurres (destructifs pour la société territoriale existante, par exemple la fiction de la parenté multiple comme lien intrinsèque des groupes identitaires ethno-nationaux) créait, au xixe siècle, à l’intérieur des sociétés territoriales les frontières inter-ethniques présentées comme éternelles, anhistoriques voire naturelles, provisoirement recouvertes par des alluvions accidentels. Les seuls moments historiques dans cette conception de l’histoire et de la société sont son opacité et sa torsion. Au xixe siècle en Europe centrale on est parvenu, par ce jeu des illusions et des leurres, à une charnière dans l’histoire sociopolitique, altérée par sa propre représentation, intercalée entre la société de l’Ancien Régime et celle de l’ère des nations et de l’industrie.
L’identité structurale de base des nationalismes n’est que le point de départ de la production d’une bigarrure des Völker dans les représentations généralisées : « On ne peut pas se contenter non plus d’imputer à la diffusion d’un modèle de représentation indéfiniment reproduit les nombreuses similitudes que l’on perçoit d’une nation à l’autre dans la manière dont chacune présente le récit des origines, en exhibe les traces matérielles ou littéraires qui sont censées l’authentifier [...] Si le développement de l’instruction dans l’Europe du xixe siècle suscite, au–dessus des cultures nationales naissantes, la formation d’une sorte de marché commun des imaginaires nationaux qui accroît la circulation des clichés et de modes, cette circulation explique davantage l’utilisation des mêmes accessoires (épopées, chansons, témoignages du folklore, multiplication des lieux et des événements commémoratifs) que l’uniformité de la structure démonstrative elle–même. L’uniformité est frappante si l’on considère l’identification du caractère national aux traditions paysannes »16.
Une idéologie identitaire fonctionnant comme camisole de force, uniforme et prête à porter à la fois, n’est qu’une des conditions nécessaires pour le nationalisme en forme de ghetto encore dominant dans l’Europe centrale17. Si l’on laisse de côté les détails de narration, ce nationalisme est réductible à une combinaison du principe de parcimonie (« rasoir ») d’Ockham et du critère de redondance qui permet de réduire, en apparence, les structures complexes aux composantes hétérogènes à des blocs homogènes.
Références
- Le provincial dans le sens de ce texte n’est pas une personne ou grade, mais une structure voire un ensemble cohérent des systèmes des savoirs – comportements organisant une importante partie de la vie symbolique d’un groupement socio-culturel. Son fonctionnement est non-conscient et contraignant. Le provincial n’est donc pas l’attribut d’une collectivité mais une organisation spécifique d’imaginaire, un dispositif mental et culturel qui produit les suites des représentations collectives et se résorbe lui-même dans son propre circuit tout en affectant l’« horizon micro » de la vie sociale par les torsions de ses discours, ses systèmes de pensée coupés de la réalité sociale, ses représentations perverties. Cet ensemble structuré de savoirs-représentations-modes de pensée-comportements dispose d’une hiérarchie sans sommet et, pour cette raison, infinie.
- Cf. Hobsbawm, Eric J. et Ranger, Terence (eds. 1983), The Invention of Tradition (réimpression 1997), Canto edition, Cambridge University Press, Cambridge ; Anderson, Benedict (1983), Imagined Communities: Reflections On the Origin and Spread of Nationalism, Verso, London & New York et Hobsbawm, Eric J. (1990), Nations and Nationalism since 1780. Programme, Myth, Reality, Canto edition, Cambridge University Press, Cambridge.
- Sur l’espace discursif comme « espace des régulations idéologiques », et, notamment, d’« épurations » qui s’appliquent sur tous les niveaux discursif (des menus de bistrots aux missives bureaucratiques) dans le cas du nationalisme croate récent voir l’étude excellente de Snježana Kordić (2010), Jezik i nacionalizam [Langue et nationalisme], Durieux, Zagreb. Citons également Kramberger, Taja (2007), Historiografska divergenca. Razsvetljenska in historistična paradigma. O odprti in zaprti epistemični strukturi in njunih elaboracijah [Divergence historiographique. Paradigmes éclairé et paradigme historiste. Sur les structures épistémiques ouverte et close et sur leurs élaborations], Založba Annales, Koper et Rotar, Drago (2007), Odbiranje iz preteklosti. Okviri, mreže, orientirji, časi kulturnega življenja v dolgem 19. stoletju [Trier dans le passé. Cadres, réseaux, repères, temps de la vie culturelle au cours du long xixe siècle], Založba Annales, Koper.
- Du point de vue épistémologique, on se sent proche au projet scientifique de Marc Angenot (1988 A), « Pour une théorie du discours social : problématique d’une recherche en cours », in Littérature, n° 70 (Méditations di social, recherches actuelles), p. 82–98 ; (1988 B), « Rhétorique du discours social », in Langue française, n° 79, p. 24–36 ; (1989 A), 1889. Un état du discours social, Éditions Balzac, Montréal et (1989 B), « Malaise dans l’idée de Progrès (1889) », in Mots, n° 19, juin, p. 5–22.
- Versuch einer Geschichte von Krain und den übrigen Länder der südlichen Slaven Österreichs, 2 vol., Laibach, 1788 et 1791 (traduction slovène date de 1982) où il voulait présenter « den Gang der Menschkeit in diesen kleinen Theile Europas ». Sur A. T. Linhart cf. Lino Legiša, Alfonz Gspan et Anton Slodnjak (1956), Zgodovina slovenskega slovstva [Histoire de la littérature slovène], vol. 1, Slovenska matica, Ljubljana. Voir également Fran Zwitter, (1939), « Prva koncepcija slovenske zgodovine » [« La première conception de l’histoire slovène »], in Glasnik Muzejskega društva za Slovenijo, 20, p. 355–372 ; (1957), « A. T. Linhart in njegovo zgodovinsko delo » [« A. T. Linhart et son travail historique »], in Naša sodobnost, V/1, Ljubljana, p. 1‒13 et (1981), « Linhartova doba, misel in delo » [« L’Âge de Linhart, sa pensée et son travail »], dans la traduction slovène de l’Essai de Linhart », in Slovenska matica, Ljubljana, p. 303–350. Voir également Kramberger (2007, p. 139‒175).
- August Ludwig von Schlözer (1771), Allgemeine Geschichte von dem Norden, Göttingen et (1772‒1773 in 1997), Universal-Historie (1772/1773): mit Beilagen, Waltrop, Göttingen, Gotha ; Vorstellung seiner Universal-Historie (1772/1773): mit Beilagen (réimpression de 1ère édition ; nouvelle éd. avec l’introduction et commentaires par Horst Walter Blanke), et, naturellement, après l’avènement de la philosophie de l’histoire de J. G. v. Herder (1812) où il parle des Slaves et de leur nature bénigne. Sur Schlözer et son épistémologie de l’histoire cf. T. Kramberger (2007, p. 73‒138, p. 204–220, p. 234–257). C’est bien chez ce dernier qu’on trouve, bien avant le Turnvater Friedrich Ludwig Jahn (1810), Deutsches Volksthum, Riemann und Gomp, Lübeck et (1833), Merke zum deutschen Volksthum, (3 tomes), J.C.H. Knopf, Hildburghausen et son deutsches Volkstum, l’idée du Volk comme entité quasi génétique.
- Marc Angenot, (1989 B), « Malaise dans l’idée de Progrès (1889) », in Mots, n° 19, juin, p. 5–22.
- Cf. Pierre Bourdieu (1975), « L’ontologie politique de Martin Heidegger », in Actes de la recherche en sciences sociales, no. 5/6, p. 109–156 et (1988), L’ontologie politique de Martin Heidegger, Éditions de Minuit, Paris.
- Pour la réflexion sur l’historisme voir Oexle, Otto Gerhard (1996), Geschichtswissenschaft im Zeichen des Historismus, Vandenhoek & Ruprecht, Göttingen ; (2001), L’historisme en débat. De Nietzsche à Kantorowicz, Aubier, Paris ; Kramberger, 2007, p. 177–257.
- Werner, Michael et Zimmermann, Bénédicte (2003), « Penser l’histoire croisée : entre empirie et réflexivité », in Annales HSS, janvier-février, n° 1, p. 8.
- Déjà Durkheim et Mauss, mais aussi Max Weber, parlaient explicitement de la légitimité de plusieurs regards sur un objet (Weber, Max (1992), Essai sur la théorie de la science, Plon, Paris, p. 172).
- Kramberger, Taja, au travers de (2002), « Doxa et fama. O produkciji «javnega mnenja» in strategijah pozabe – elementi za mikroštudijo » [Doxa et fama. Sur la production de « l’opinion publique » et sur les stratégies de l’oubli éléments pour une micro-étude], Družboslovne razprave, XVIII/41, p. 63–100 ; (2007) ; (2009), Memorija in spomin: zgodovinska antropologija kanonizirane recepcije: (študija primera revije Modra ptica (1929–1941). Bartol z Vidmarjem), 1242 p., 55 tabel, 13 grafičnih prikazov, 34 grafov, 12 prilog [La mémoire et le souvenir. Anthropologie historique de la réception canonisée (Étude du cas : revue et maison d’édition Modra ptica [L’Oiseau bleu], 1929–1941, Bartol avec Vidmar) ; 1242 p., 55 tableaux, 13 présentation graphiques, 34 graphes, 12 suppléments], UP FHŠ, Koper et (2011), « Kdo je za koga reprezentativen in zakaj? Kratka analiza literarnega polja v Dravski banovini s posebnim ozirom na založniške aktivnosti Belo-modre knjižnice in založbo ter revijo Modra ptica [Qui est représentatif pour qui et pourquoi ? Une brève analyse du champ littéraire dans la Dravska banovina avec la considération spéciale envers les activités d’édition de la Bibliothèque bleue-blanche et envers la maison d’édition l’Oiseau bleu] », dans Taja Kramberger et Drago Rotar, Nevidne evidence. Misliti idola tribus [Les évidences invisibles : penser idola tribus], Založba Sophia, Ljubljana, p. 99–175 a élaboré, empiriquement et théoriquement, la conception des discours de transformation (dialogiques, réflexifs, changeables : du lat. trans – outre, par-dessus, à travers, sur et lat. formo – former, façonner, concevoir) et de ceux de transfirmation (fermés pour la réflexion, objectivation, changements, monologiques ; lat. trans et firmo – affermir, consolider, confirmer) et de leurs traits distinctifs qui contribuent à la compréhension du fonctionnement du provincial sur le plan discursif.
- La demande de l’autoréflexivité est présente presque partout dans l’œuvre de P. Bourdieu et, spécialement, dans (1987), Choses dites, Éditions de Minuit, Paris, p. 155 sq., et dans (2001), Science de la science et réflexivité, Éditions Raisons d’agir, Paris, en plusieurs endroits.
- Pour un aperçu relativement critique de la « mythologie » ethno-génétique dans l’historiographie slovène cf. Peter Štih (2002), « Nacionalizacija zgodovine in nastanek sovražnih predstav o sosedih. Slovensko nemški primer » [« Nationalisation de l’histoire et naissance des représentations hostiles des voisins. Le cas slovèno-germanique »], dans F. Mayhofer-Grünbühel & M. Polzer (éd.), Avstrija – Slovenija. Preteklost in sedanjost, [Autriche – Slovénie. Le passé et le présent], Cankarjeva Založba, Ljubljana, Založba Wieser, Klagenfurt (Celovec), p. 35–46 ; François Hartog et Jacques Revel (éds. 2003), Usages politiques du passé, Paris, Éditions de l’EHESS, et Giovanni Levi (2003), « Le passé lointain. Sur l’usage politique du passé », dans Hartog et Revel, 2003.
- Cf. à titre d’exemple B. Grafenauer (1985), « Skupni slovenski kulturni prostor: plenum kulturnih delavcev OF, 13. sklic, Goriška srečanja ‘85 [Espace culturel slovène commun (Treizième convocation du plénum des travailleurs culturels du Front de libération 1985)] », Nova Gorica, p. 21–29, sur « l’espace culturel slovène » comme « critère pour les sciences historiques » ; Grafenauer, Bogo (1968), « Karantanija in njena dvakratna vloga v oblikovanju slovenske narodne zavesti » [« Carantanie et son double rôle dans la formation de la conscience nationale slovène »], Kronika 16, (1968), p. 129‒136 et (1986), « Zgodovinsko gledanje na spreminjanje narodnega značaja nasploh in na vprašanje slovenskega narodnega značaja posebej » [« Le regard historique sur le changement du caractère national en général et, spécialement du caractère national slovène »], in Sodobnost, p. 1107–1118.
- Bruhns, Hinnerk, et Burguière, André (2003), « Imaginaires nationaux. Origines, usages, figures », in Annales HSS, 58/1, jan.– fév., p. 7‒38.
- Cf. Rotar, Drago (2004), « Épuration comme la forme de culture. La transformation des paradigmes mentaux en Carniole au xixe siècle / Čistka kot kulturna forma. Transformacija mentalnih paradigem na Kranjskem v 19. stoletju – povzetek », Monitor ZSA, VI/1–2, p. 45–70 et (2005), « Trier dans le passé. Le Vörmarz et sa réception en Slovénie aujourd’hui. Réflexions sur le “bon”, le “mauvais”, l’“inconvenant” », in Annales Histoire, sciences sociales, Koper, XVI/1, p. 77–92.
Drago Rotar a été professeur à la Faculté de sciences humaines de l’université du Littoral à Koper, Slovénie, qu’il a quitté en raison de son opposition à la purge illicite de 2011. Il a enseigné à l’université de Ljubljana de 1970 à 2006, a fondé l’Institutum studiorum humanitatis et a été doyen de l’ISH (École des hautes études en sciences humaines), à Ljubljana. Ce texte est tiré de l’introduction à l’étude des Effets de la circulation culturelle et intellectuelle entre la France et l’Europe centrale (1848‒1918) soutenu par l’IEA Paris en 2012‒2013, et écrit en collaboration avec sa compagne Taja Kramberger avec qui il travaille depuis plus de 10 ans.
La photo illustrant l'article montre deux hommes en costume folklorique slovaque, pars pro toto de la région.