A quoi pensent les historiens ?
date
adresse
IEA de Nantes, amphithéâtre Simone Weil, 5 allée Jacques Berque, 44000 Nantes
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Conférence de Roger Chartier, professeur au Collège de France, directeur d’études à l’Ecole des hautes études en sciences sociales et Visiting Professor à l’Université de Pennsylvanie. Son domaine de recherche est l’histoire de la culture écrite à l’époque moderne.
Mettant à profit la récente publication du livre A quoi pensent les historiens? Faire de l’histoire au XXIe siècle, dirigé par Christophe Granger et publié par Autrement, cet exposé suivi d’une discussion d’abord avec Ibrahima Thioub et Perry Anderson et ensuite avec le public s’attachera, d’abord, aux défis lancés à l’histoire par des extérieurs au champ académique : ainsi, l’entrée dans le monde du numérique, qui transforme non seulement les conditions de la recherche mais aussi la relation avec le lecteur; la « crise » de l’édition qui l’accompagne, sans en être nécessairement la conséquence, ou encore la multiplication des usages sociaux de l’histoire devenue loisir collectif ou exigence de mémoire. D’autres défis sont situés dans le champ intellectuel et scientifique: ainsi, l’appropriation des objets historiques par les sciences cognitives et les neurosciences qui proposent un « tournant biologique » et rapportent aux localisations et circuits cérébraux des constantes universelles (structures linguistiques, formules esthétiques, régimes émotionnels, etc.); ainsi, la tension entre parentés morphologiques et transmissions historiques, qui est une question essentielle pour les histoires connectées; ainsi, le rapport que les historiens entretiennent aujourd’hui avec la « littérature ». Il ne s’agit plus seulement de reconnaître la dimension rhétorique ou narrative de l’écriture d’histoire, ni non plus de repérer la fiction dans les archives, mais bien de s’emparer de procédés d’écriture traditionnellement interdits à leur discipline. Demeure, toutefois, la nécessité de fonder le régime de connaissance spécifique de l’histoire, toujours, écrite à partir de positions singulières, mais toujours, aussi, soumise aux règles de production et de validation du savoir qui s’imposent à tous ceux et celles qui la pratiquent.