Le cartésianisme aux Pays-Bas: philosophie, théologie, exégèse

date

Thursday 29 January 2015, 10h00 - 12h00

adresse

Collegium de Lyon, 15 parvis René-Descartes, 69007 Lyon

Le cartésianisme aux Pays-Bas: philosophie, théologie, exégèse

Que se passe-t-il lorsqu’un philosophe français et catholique s’établit dans un pays qui a récemment obtenu son indépendance, après un long conflit avec l’Espagne et qui appuie son identité sur l’appartenance à la foi réformée ? S’il est vrai, comme on l’a récemment affirmé, que Descartes est la France, l’inverse n’est pas totalement exact. On oublie en effet facilement que c’est sa rencontre en 1618 avec Isaac Beeckman qui lui permet de développer ses études mathématiques, physiques et musicales et que c’est aux Pays-Bas que Descartes décide finalement de s’établir : il y passera une vingtaine d’années, entre 1629 et 1649, lorsqu’il prendra la décision fatale de partir pour la Suède.

 

C’est aux Pays-Bas qu’il a donc rédigé la presque totalité de ses ouvrages. Peut-on croire qu’elles sont tout à fait imperméables à l’atmosphère culturelle et politique où elles ont été conçues ? La critique la plus récente souligne au contraire que certaines de ses œuvres sont à interpréter en tenant compte des réactions qu’elles suscitent dans les milieux universitaires et culturels néerlandais. Des milieux qui ne sont pas du tout insensibles à la pensée de Descartes : à la différence de ce qui arrivera dans d’autres pays, dans les Provinces Unies la diffusion du cartésianisme est précoce et concerne surtout les universités. Les débats qu’elle déclenche ont des dynamiques très complexes, où jouent toutes les particularités de la vie sociale néerlandaise : une culture universitaire largement débitrice à Aristote, mais sensible parfois à la nouvelle philosophie de Francis Bacon, Pierre Gassendi et Descartes lui-même ; le caractère fédéral des pouvoirs publics ; les rapports difficiles entre les représentants du pouvoir religieux et les membres du gouvernement politique ; l’absence d’organismes de contrôle de l’orthodoxie religieuse aussi invasifs que l’Inquisition romaine.

La relation entre Descartes et les Pays-Bas peut donc être considérée comme un transfert culturel. Ma recherche vise deux principaux objectifs : étudier comment s’articulent, dans la réflexion théorique, mais aussi dans la pratique des professeurs néerlandais, la philosophie et la théologie ; examiner les débats sur l’interprétation des Écritures soulevés par la diffusion du cartésianisme. Le premier volet nécessite de mobiliser des compétences interdisciplinaires : tracer la ligne de partage entre ces deux disciplines ne nous permet pas seulement d’étudier les arbres du savoir esquissés par les contemporains de Descartes, mais revient aussi à jeter un coup d’œil sur la vie universitaire de son temps, sur les rapports entre collègues appartenant à des facultés différentes, sur les équilibres qui règnent entre la sphère religieuse et la sphère politique.

 

Le deuxième volet propose d’analyser les débats sur l’exégèse de la Bible déclenchés par la diffusion du cartésianisme aux Pays-Bas sans se limiter à les situer dans l’histoire des sciences, mais en les mettant en rapport avec l’évolution de l’interprétation de la Bible dans les pays Réformés. Une analyse systématique de ces polémiques permettrait d’illustrer de manière innovante les stratégies collaboratives mises en œuvre par les cartésiens néerlandais aussi bien que leurs différentes positions et d’approfondir notre connaissance de l’herméneutique Réformée de la Bible à travers un chapitre inédit.
 

Le but final est de préciser les caractères de la diffusion de cartésianisme aux Pays-Bas et leur évolution dans le temps, mais aussi de situer les dynamiques culturelles néerlandaises dans le panorama européen de l’époque.

fellows

Philosophie
15/09/2014 - 15/07/2015