Roberto Santaguida

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Fragments de guérison : dialogues artistiques et scientifiques sur le cancer et l’immunothérapie
Maladie, immunothérapie et poétique du corps
Je développe un projet de recherche-création qui croise l’art contemporain et le traitement du cancer, en mettant l’accent sur la science de l’immunothérapie. Enracinée dans mon expérience de documentariste et de vidéaste, cette initiative explore le paysage intérieur du patient, les mécanismes invisibles du corps et les récits culturels qui façonnent notre compréhension de la maladie.
Le projet examine la manière dont le langage est utilisé pour représenter le cancer. Je m’intéresse à la façon dont ces représentations sont guidées par l’imagerie et à la façon dont les stratégies anti-narratives peuvent remettre en question les paradigmes dominants concernant le traitement, la guérison et le terrain émotionnel qu’ils englobent.
Ma pratique se situe entre le connu et l’inconnu. Elle se déploie à travers un processus lent et circulaire, attentif aux moments qui passent souvent inaperçus. Ce projet aborde l’immunothérapie par le biais de la métaphore, de la sensation et de la poétique. Il ne s’agit pas d’une traduction de la science en art, mais d’une conversation multidisciplinaire.
L’une des composantes du projet examine comment le corps mobilise ses propres défenses, comment les lymphocytes T sont activés pour cibler les cellules cancéreuses. J’ai l’intention de produire une œuvre vidéo qui visualise ce processus sous forme d’évocation poétique plutôt que d’illustration scientifique. En utilisant l’abstraction, le mouvement, la lumière et le son, j’espère transmettre la texture émotionnelle de la transformation du corps. Que signifie se voir différemment ? À quoi peut ressembler la reconnaissance cellulaire ?
S’inspirant de la microscopie, de la dynamique des fluides et des formes organiques, le travail reste ancré dans la recherche scientifique, tout en incorporant des souvenirs et des récits personnels. J’ai l’intention de collaborer avec des chercheurs en oncologie et des immunologistes, en établissant un dialogue par le biais d’entretiens, de visites de laboratoires et d’une réflexion commune.
Récit, langage et expérience vécue de la maladie
Le projet intégrera une dimension sociale. Le cancer est également façonné par le langage que nous utilisons pour le comprendre. Des termes apparaissent souvent dans le discours public, offrant de la force à certains, mais se révélant distants ou limitants pour d’autres. Dans une phase ultérieure du projet, j’associerai l’imagerie scientifique aux métaphores des patients : des expressions fragmentées et personnelles de la vie avec la maladie. L’idée est de refléter un éventail d’expériences vécues, sans imposer un récit unifié.
Ce projet s’inscrit dans la continuité de ma méthode qui consiste à s’éloigner de la linéarité et de la clarté dans la narration. J’utiliserai des structures non chronologiques et des montages en boucle qui traduisent la fragmentation de la maladie chronique. Je suis attirée par les moments calmes, mais chargés : le poids du dialogue clinique et le changement de sens que la maladie impose aux mots ordinaires. Le résultat final prendra la forme modulaire de courtes pièces vidéo expérimentales et d’un documentaire plus long.
J’aimerais inclure les perspectives professionnelles des oncologues, des infirmières et des techniciens de laboratoire afin d’élargir une dimension centrale du projet. Leurs métaphores, leurs émotions et leurs stratégies d’adaptation sont souvent éclipsées par les exigences institutionnelles ou confondues avec l’expertise technique. En les invitant à transmettre leur langage personnel de soins, j’espère créer un cadre où coexistent le détachement clinique et la vulnérabilité humaine. Cela approfondira la structure polyphonique de l’œuvre finale, mêlant la retenue professionnelle à la perspicacité émotionnelle pour révéler comment les soins sont à la fois donnés et intériorisés.
Je crois que l’art peut recadrer la façon dont nous percevons la maladie en posant des questions. Que signifie guérir face à l’inconnu ? Comment vivons-nous avec des processus que nous ne pouvons ni voir ni contrôler ? Comment pouvons-nous exprimer la résilience sans invoquer le triomphe ? La relation entre l’art et la science est souvent présentée comme une relation de traduction. Je propose un modèle basé sur la provocation mutuelle : tester des idées et ébranler des hypothèses.
J’espère générer de nouvelles formes de vision, de pensée et d’écoute, en ouvrant un espace pour ce que la maladie peut nous apprendre sur le corps, les systèmes et les histoires que nous portons.
biographie
Depuis qu’il a terminé ses études en production cinématographique à l’Université Concordia, les films et vidéos de Roberto Santaguida ont été présentés dans plus de 400 festivals internationaux, dont le Tampere Film Festival (Finlande), CPH : DOX, Copenhagen International Documentary Film Festival (Danemark), Contemporary Art Festival Sesc_Videobrasil (Brésil), Flickers’ Rhode Island International Film Festival (États-Unis), transmediale (Allemagne), et Message to Man (Russie).
Il a également participé à des résidences d’artistes dans de nombreux pays, dont l’Iran, la Roumanie, l’Allemagne, la Norvège et l’Australie. Roberto est lauréat du K.M. Hunter Artist Award, de la Chalmers Arts Fellowship et d’une bourse de l’Akademie Schloss Solitude en Allemagne.